Agrément des établissements de paiement dans la CEMAC : ce qui change dans la prestation des services de paiement mobile

Professeur KALIEU ELONGO Yvette Rachel
Université de Dschang

La prestation des services de paiement via les solutions mobiles existe déjà depuis de nombreuses années dans la CEMAC. Mais jusqu’à l’agrément il y a quelques semaines des deux premiers établissements de paiement, seuls les établissements de crédit et de microfinance dans une certaine mesure pouvaient exercer cette activité en s’appuyant sur le partenariat technique des entreprises de téléphonie mobile comme les y autorise la loi. La donne a changé. Les entreprises de téléphonie mobile ou tout au moins certaines de celles évoluant dans la CEMAC ont créé des filiales agréées pour la prestation de ces services.  Contrairement aux établissements de crédit et de microfinance, l’accomplissement des services de paiement est exclusive de toute autre activité pour les établissements de paiement.

Dans la pratique, il n’y a de véritable changement pour les consommateurs qui continueront à profiter de ces services à travers les distributeurs et sous distributeurs agréés. Mais juridiquement il y a quelques changements ou tout au moins il faut attirer l’attention sur ce qui change.

Il faut déjà signaler que dans les rapports entre les établissements de paiement et les autorités de contrôle notamment la COBAC, ces établissements sont soumis à certaines règles  prudentielles qui leur sont propres mais relèvent du contrôle de la COBAC qui dispose à leur égard du même pouvoir de contrôle et de sanction que contre tous les autres établissements assujettis . Ils peuvent subir les mêmes sanctions par exemple le retrait d’agrément. Ils sont dans certains cas soumis aussi au contrôle de la BEAC.

Mais c’est surtout dans les rapports entre les établissements de paiement et les consommateurs qu’il convient de relever des changements. Ainsi, les établissements de paiement sont désormais tenus de toutes les obligations qui sont imposées par les régulateurs en vue de la protection des consommateurs de produits et services bancaires lorsque celles-ci concernent les services qu’ils rendent conformément aux règlements n° 01/20/CEMAC/ UMAC/COBAC  du 03 juillet 2020 relatif à la protection des consommateurs des produits et services bancaires dans la CEMAC et R-2020/06 du 30 juillet 2020 relatif au traitement des réclamations des consommateurs des produits et services bancaires
dans la CEMAC. Il s’agit notamment   de :

  •  l’obligation d’information précontractuelle et contractuelle des consommateurs particulièrement  sur la tarification des services
  • L’obligation de respecter le formalisme du contrat en ce qui concerne surtout  le contrat d’ouverture des comptes de paiement – connus sous le nom de comptes mobiles – que tiennent les établissements de paiement
  • L’ obligation de transparence
  • les obligations liées au traitement amiable des litiges de consommations par la mise en place des procédures de réclamation et de médiation bancaire 
  • Les obligations liées à la  protection des données personnelles, etc.

Bien que la prestation des services des paiements soit faite principalement par  les distributeurs et sous – distributeurs, ces derniers ne sont  que des mandataires et des sous mandataires agissant pour le compte des établissements de paiement. Il reviendra donc aux établissements de paiement de répondre dans tous les cas des manquements constatés. C’est dire que autonomie ne rime pas avec liberté mais avec responsabilité…