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Exercice et contrôle de l’activité de microfinance en Afrique Centrale : le cadre réglementaire revu et corrigé

Exercice et contrôle de l’activité de microfinance en Afrique Centrale :le cadre réglementaire revu et corrigé

Par Pr KALIEU ELONGO Yvette

 

C’est par un ensemble de règlements adoptés en 2017 par la COBAC que les autorités communautaires ont procédé à une modification du cadre d’exercice et de contrôle de l’activité de microfinance dans la CEMAC.

Le texte le plus important est sans doute le Règlement n° R-01/17/CEMAC/UMAC/COBAC du 27 septembre 2017 relatif aux conditions d’exercice et de contrôle de l’activité de microfinance dans la CEMAC auquel il faut ajouter d’autres règlements tout aussi importants les uns que les autres à savoir :

Ce nouveau dispositif se substitue à celui mis en place en 2002. On se rappelle en effet que c’est en 2002 que les premiers règlements relatifs à l’encadrement de l’activité de microfinance ont été adoptés à un moment où cette activité était encore à ses débuts en Afrique Centrale. Quelques années après, ces règlements se sont révélés inadaptés du fait de l’expansion de l’activité qui a révélé certaines insuffisances du dispositif existant.

Les nouveaux textes ont pris en compte cette évolution de l’activité des EMF et les nouveaux enjeux tels que la question du capital social minimum des EMF, le contrôle des EMF et en particulier le contrôle interne, la gouvernance des EMF, la lutte contre le blanchiment des capitaux entre autres.

Les modifications apportées aux conditions d’exercice et de contrôle de l’activité bancaire sont d’une grande ampleur. On se limitera à en présenter brièvement quelques-unes :

  • Relativement à la classification des EMF, la distinction entre EMF de première, deuxième et troisième catégorie a été maintenue, cependant les EMF de première catégorie doivent désormais être organisés en réseaux ATD tout EMF de première catégorie doit appartenir à un réseau ayant à sa tête un organe faîtier.
  • Pour ce qui est de la forme sociale, les nouveaux règlements prévoient que les EMF de première catégorie doivent être obligatoirement constitués sous forme de société coopérative avec conseil d’administration alors que les EMF de deuxième et troisième catégorie doivent être des sociétés anonymes avec conseil d’administration. Si la situation des EMF de deuxième catégorie reste inchangée, il n’en est pas de même pour celles de première catégorie qui étaient caractérisées par un vide juridique relativement à leur forme sociale. On a constaté en effet que qu’ils pouvaient être constitués sous toutes les formes juridiques et même sous forme d’association ! Quant aux EMF de troisième catégorie, le texte était silencieux.
  • Relativement au capital social minimum, si la réglementation n’exige toujours pas de capital social minimum pour les EMF de première catégorie, ce capital a, par contre, été porté à la hausse pour les EMF de deuxième et troisième catégories. Il est désormais de 300 millions de francs CFA pour les premiers et 150 millions de francs CFA pour les seconds.
  • Relativement au contrôle de l’activité, des pouvoirs plus importants sont désormais attribués à l’autorité nationale qui exerce un contrôle administratif sur les EMF alors que la COBAC assure surtout la supervision de ces établissements à travers l’exercice des pouvoirs de contrôle sur place et sur pièces qui peuvent entraîner, le cas échéant, la mise en œuvre de sanctions notamment les sanctions disciplinaires.
  • Tirant les conséquences des nombreuses défaillances des EMF dues en partie aux crédits accordés, parfois sans limitation, les nouveaux règlements, en particulier le règlement COBAC EMF R-2017/ 08  portant  plafonnement du montant du crédit accordé par les établissements de microfinance limite les encours de crédit à accorder tant à la clientèle  qu’aux administrateurs, dirigeants et salariés.  Pour la clientèle, ce montant est fixé par rapport au capital social de l’EMF.  Il est de 10 % du capital libéré quel que soit le montant de ce capital alors que pour les autres, ce montant est limité à 50 000 000 F CFA quel que soit le statut (actionnaire, coopérateurs, employé, administrateur). Cette limitation n’est cependant pas exclusive du respect des différentes normes prudentielles.
  • Par ailleurs, le nouveau règlement sur le contrôle interne réorganise assez profondément le cadre juridique du contrôle interne des EMF et des organes faîtiers en rappelant les règles essentielles qui doivent être respectées.
  • Sur le plan de la gouvernance, en plus des dispositions spécifiques réservées au gouvernement d’entreprise des EMF qui s’inspirent elles-mêmes de la gouvernance des établissement de crédit mais tout en s’adaptant à la situation des EMF, il y a des règles qui limitent désormais le nombre des administrateurs et des actionnaires des EMF aussi bien en fixant les minima que les maxima ainsi que le nombre des EMF qui doivent constituer un réseau.
  • Le nouveau règlement a enfin repris à son compte les dispositions relatives au traitement des difficultés des EMF telles que prévues par le règlement de 2014 tout en les adaptant sur quelques points aux particularités des EMF. C’est ainsi par exemple qu’a été institué la procédure de liquidation simplifiée pour les EMF de première catégorie de petite taille.

 

C’est depuis le 1er juillet 2018 que le nouveau dispositif réglementaire est entré en vigueur. Même si les textes ont prévu sur certains points une mise en harmonie progressive aalnt parfois jusqu’en 2021, les EMF devraient se presser le pas pour s’arrimer aux nouvelles règles  si elles veulent éviter de se retrouver dans la situation qu’ont malheureusement connu certains EMF.

 

 

 

 

 

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  1. L’honneur m’echoit de venir auprès de votre haute responsabilité vous adresser mes remerciements.En effet,je compte avoir vos publication directement dans mon adresse email. Merci cordialement.

  2. S’il vous plait en quoi consiste le controle administratif de l’autorité nationale.quels sont les éléments qui entrent dans ce controle

  3. TAPTCHOU TAPTCHOU AXEL

    Bonjour je souhaite avoir vos différentes publications dans ma boîte mail merci.

    • Kalieu Yvette

      Vous pouvez les télécharger directement en cliquant sur chaque article.
      merci de visiter le blog

  4. Mouafo

    Bonjour professeur
    Qu’est ce qui peut expliquer la prolifération des EMF au cameroun en particulier et dans la CEMAC en général ?

    • Kalieu Yvette

      A priori on peut dire qu’il y a prolifération mais ce n’est pas vraiment le cas. La réglementation CEMAC prévoit trois catégories d’EMF 1ère , deuxième et troisième catégorie avec des conditions différentes. Avant la réforme de 2017 les EMF de 1ère catégorie pouvaient fonctionner sous forme d ‘association ou de GIC ou coopérative et il n’existait pas de capital social minimum. Cela a dû justifier le grand nombre d’EMF surtout de 1ère catégorie. Depuis la réforme de 2017 , les EMF de 1ère catégorie doivent être sous forme de Société coopérative avec CA et être constitués sous forme de réseau. Cela devrait réduire le nombre d »EMF de 1ère catégorie. Mais pour les 2ème et 3ème catégorie, il faut être sous forme de SA avec CA et le chiffre d’affaires est assez élevé leur nombre est donc plus réduit .

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