La protection du consommateur au Cameroun : dix ans après l’adoption de la loi -cadre du 6 mai 2011
Pr Yvette Rachel KALIEU ELONGO
Depuis dix ans, le consommateur camerounais dispose d’un cadre spécifique de protection à lui consacré. En adoptant cette loi, le législateur camerounais faisait presque figure d’avant-gardiste en Afrique subsaharienne et particulièrement en Afrique Centrale. Il n’existait en effet alors que peu de textes consacrés expressément à la protection du consommateur.
Comme le précise son article 1er, la loi du 6 mai 2011 avait pour objectif principal de fixer le cadre général de la protection du consommateur dans toutes les transactions relatives à la fourniture, la distribution, la vente, l’échange de technologies, de biens et de services notamment dans les secteurs de la santé, de la pharmacie, de l’alimentation, de l’eau, de l’habitat, de l’éducation, des services financiers et bancaires, du transport, de l’énergie et des communications. Il s’agissait donc d’un texte à vocation générale qui devait être complété par des textes sectoriels plus spécifiques à certains domaines.
Si beaucoup reste à faire pour assurer une pleine efficacité de la protection du consommateur au Cameroun, on peut noter que depuis 2011 les lignes ont véritablement bougé. Le conseil national de la consommation a effectivement mis en place, de nombreuses associations de consommateurs ont été créées et l’ engouement pour la prise en compte des intérêts des consommateurs est réel et de plus en plus visible.
Toutefois, peu de textes d’application ont depuis alors été adoptés pour protéger spécifiquement les consommateurs dans différents domaines.
Il y a cependant quelques domaines où le consommateur se voit désormais consacrer un véritable statut. C‘est le cas du consommateur de services et produits bancaires à travers le Règlement COBAC du 03 juillet 2020 relatif à la protection des consommateurs des produits et services bancaires dans la CEMAC auquel on peut ajouter le Règlement du 30 juillet 2020 relatif aux obligations spécifiques des établissements assujettis pour la protection des consommateurs dans le cadre de la fourniture des services de paiement. Il est vrai que dans ce domaine les règles applicables soient d’origine communautaire ce qui n’est que la conséquence de la réglementation de l’activité bancaire au niveau communautaire. C’est aussi le cas des consommateurs des TIC avec le Décret du 27 février 2013 fixant les modalités de protection des consommateurs des services de communication électronique. A cela, il faut ajouter loi du 22 décembre 2015 régissant l’activité commerciale au Cameroun qui comporte des dispositions relatives à la protection des consommateurs.
Sur le plan communautaire par contre, la protection du consommateur a connu une évolution remarquable avec la Directive N°02/19-UEAC-639-CM-33 du 08 avril 2019 harmonisant la protection du consommateur au sein de la CEMAC. Pourtant, cette directive malgré son importance, ne remet pas véritablement en cause l’existence de la loi du 6 mai 2011.
S’agissant effectivement d’une directive communautaire, elle précise uniquement les objectifs et résultats à atteindre en laissant aux différents Etats membres de la communauté le choix des moyens pour les réaliser. Par conséquent, le Cameroun disposant, antérieurement à l’adoption de la Directive d’une législation nationale, il faut et il suffit que cette loi soit mise à jour par rapport à la Directive. Il s’agit par exemple de la notion de consommateur pour laquelle le texte communautaire opte clairement pour une conception restrictive en la limitant aux personnes physiques ou de la mise en place de différents commissions telles que la Commission des clauses abusives ou encore la commission de sécurité des consommateurs.
On peut donc mesurer et apprécier le chemin effectivement parcouru depuis 2011 dans le sens d’une plus grande protection du consommateur. Toutefois, au-delà de la mise en conformité avec le droit communautaire qui s’impose au législateur camerounais, les attentes restent nombreuses dans des domaines spécifiques comme la santé où le consommateur camerounais aurait bien besoin d’une protection particulière et plus efficace.
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