Quels pouvoirs pour le Directeur Général adjoint d’une Société anonyme ?
( CCJA 2ème Chambre , Arrêt n°44/2021 du 8 avril 2021 et CCJA 2ème Chambre , Arrêt n°80/2021 du 29 avril 2021)
Pr Yvette Rachel KALIEU ELONGO
Université de Dschang
Il est rare que l’on s’intéresse au Directeur Général Adjoint d’une société si ce n’est pour dire parfois de manière assez lapidaire qu’il remplace le Directeur Général en l’absence de celui-ci ou qu’il exerce les fonctions que ce dernier veut bien lui confier.
Deux arrêts rendus par la CCJA en l’écart de quelques jours seulement nous donnent l’occasion de nous intéresser à cet organe de gestion peu connu ou mal connu des sociétés commerciales.
Dans la première affaire, le DGA d’un établissement de crédit avait conjointement avec le dirigeant de groupe ressources de cet établissement, signé le pouvoir aux fins de saisie immobilière donné au conseil de cet établissement de crédit et fait dresser le commandement aux fins de saisie immobilière Tous deux agissaient ainsi sur la base de la délégation de pouvoirs à eux donnée par la PCA de l’établissement de crédit. C’est cette délégation des pouvoirs qui est contestée au motif que seul de PDG peut représenter une SA avec conseil d’administration.
Dans la seconde affaire concernant également une banque, il était reproché au DGA d’une SA avec conseil d’administration, d’avoir, sans pouvoir spécial à lui accordé, représenté une succursale de la banque en lieu et place du Directeur Général
Dans les deux affaires, la CCJA a rejeté les pourvois formés au motif que dans les rapports avec les tiers, le DGA a les mêmes pouvoirs de représentation que le PDG ou le DG et que ces pouvoirs s’exercent sans qu’il y ait besoin d’une délégation de pouvoirs même lorsqu’il s’agit de la représentation d’une succursale qui n’a pas de personnalité juridique.
Ce qu’il faut en retenir c’est que le DGA a des pouvoirs propres de représentation de la société à l’égard des tiers C’est l’article 472 AUSCGIE qui le prévoit. Il n’a donc pas besoin de pouvoir spécial ou de délégation de pouvoirs pour ce faire. Ses pouvoirs de représentation sont alors identiques à ceux du Directeur Général ou du Président Directeur Général. La conséquence en est que, comme ce dernier, il engage la société par ses actes même ceux dépassant les limites de l’objet social et aucune limitation de pouvoir ne peut être opposée aux tiers de bonne foi.
C’est dire a contrario que dans tous les autres cas, le DGA n’a pas de pouvoirs concurrents à ceux du DG. Désigné par le CA sur proposition du PDG, le DGA assiste le PDG. Toutefois, cette assistance n’est pas « vague »puisque les pouvoirs qui lui sont délégués sont fixés par le CA en accord avec le PDG. Il en serait de même lorsque s’agissant des établissements de crédit comme c’est le cas en l’espèce la désignation du DGA est obligatoire ( Voir par ex article 15 Règlement COBAC du 27 mars 2015 relatif aux conditions d’exercice de la profession bancaire dans la CEMAC qui impose les deux organes mais ne précise pas les pouvoirs de l’un et de l’autre).
C’est dire en définitive que tout en restant dans l’ombre du DG ou du PDG qu’il assiste, le DGA peut de temps en temps se révéler au grand jour pour revêtir la casquette de représentant légal de la société que la loi lui reconnaît sans aucune procédure et sans autorisation.