La liquidation des sociétés d’assurance en droit CIMA
Par Pr KALIEU ELONGO Yvette Rachel, Université de Dschang
Le code CIMA a prévu des solutions pour le traitement des entreprises d’assurances en difficultés. Lorsque les mesures de sauvegarde ou de redressement n’aboutissent pas au rétablissement de la situation, il peut être procédé à la liquidation. La liquidation de toute société d’assurance est soumise aux dispositions des articles 325 et suivants du code CIMA qui prévoit les causes et le déroulement de la liquidation.
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Les causes de la liquidation
Seules deux causes de liquidation sont prévues par le code CIMA : la faillite et le retrait total de l’agrément.
. La faillite de l’entreprise d’assurance. Il faut entendre par faillite toute procédure collective ouverte pour cause de cessation des paiements et devant conduire à la liquidation des biens de l’entreprise. Le principe de la liquidation est posé avec fermeté par l’article 325 alinéa 1 du code CIMA qui dispose que : « La faillite d’une société régie par le présent code ne peut être prononcée à l’égard d’une entreprise soumise aux dispositions du présent livre qu’à la requête de la commission de contrôle des assurances ; le tribunal peut également se saisir d’office ou être saisi par le Ministère public d’une demande d’ouverture de cette procédure après avis conforme de la commission de contrôle des assurances ».
Ainsi, il y a trois modes de saisine de la juridiction compétente pour ouvrir la procédure de faillite : La saisine par la commission régionale de contrôle des assurances ; la saisine d’office ; la saisine par le Ministère public. Dans ces deux derniers cas, la saisine est faite après avis conforme de la Commission Régionale de contrôle qui dispose ainsi de pouvoirs importants.
. Le retrait total de l’agrément. De même qu’elle est compétente pour l’octroi des agréments aux entreprises d’assurance, la CRCA peut retirer cet agrément. Conformément à l’article 325-1 du code CIMA, la décision de la commission régionale de contrôle des Assurances prononçant le retrait total de l’agrément emporte de plein droit, à dater de sa publication au journal officiel et/ou dans un journal d’annonces légales, la dissolution de l’entreprise. Si la décision de retrait concerne une entreprise étrangère, elle n’entraîne pas la dissolution de celle-ci, car une telle dissolution relève d’une loi et d’une juridiction étrangères au Traité CIMA. Elle entraine en revanche la liquidation de l’actif et du passif du bilan spécial de ses opérations sur le territoire national.
Les décisions de la Commission peuvent être frappées de recours devant le Conseil des Ministres dans un délai de deux mois à compter de leur notification. En principe, le recours n’est pas suspensif. Mais lorsque la décision concerne le retrait de l’agrément, la Commission peut, à la demande du Ministre chargé des assurances, autoriser sous certaines conditions la poursuite de l’activité pendant une période maximale de 06 mois à compter de la notification de la décision. Ce délai permet d’attendre la décision du Conseil sur le recours formé.
La liquidation qui résulte du retrait de l’agrément se fait conformément aux dispositions des articles 325-1 à 325-10. La plupart de ces dispositions font expressément allusion au seul cas de retrait d’agrément à l’exclusion de celui de la faillite. On peut donc penser qu’en cas de faillite, la procédure collective normale de droit commun est ouverte.
On peut se demander si en plus de ces causes spécifiques les causes de dissolution communes aux sociétés commerciales sont applicables en la matière. On sait que selon l’article 301 du code CIMA, toute société d’assurance d’un Etat membre de la CIMA doit être constituée sous la forme de société anonyme ou de société d’assurance mutuelle. La question se pose alors de savoir si les causes de dissolution qui entraînent la liquidation des sociétés anonymes sont applicables en cette matière. La doctrine est restée hésitante sur la question ( ASSI-ESSO (A.M), ISSA-SAYEGH (J.), LOHOUES-OBLE (J.), CIMA Droit des assurances, Collection Droit uniforme africain, UNIDA, 2002, p.74). A notre avis, à partir du moment où le code CIMA ne réglemente pas la dissolution des sociétés anonymes d’assurance, le droit commun OHADA reste applicable. Les causes de dissolution de ces sociétés sont donc celles du droit commun. Seulement, il est difficile de concevoir la dissolution d’une société d’assurance sans l’avis de la CRCA. Mais lorsqu’elle intervient, la dissolution entraîne liquidation de la société.
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Le déroulement de la liquidation
La liquidation est effectuée par un liquidateur désigné sur requête de la commission par ordonnance du Président du tribunal compétent. Celui-ci choisit un liquidateur parmi ceux qui sont agréés par le tribunal et figurant sur la liste communiquée par la commission régionale de contrôle dans sa requête. Le Président commet, par la même décision, un juge-contrôleur chargé de contrôler les opérations de liquidation ( comparer avec le juge-commissaire ders procédures collectives) et assisté dans l’exercice de sa mission par un ou plusieurs commissaires contrôleurs.
Dans les dix (10) jours de sa nomination, le liquidateur publie l’ordonnance du président du tribunal dans un journal d’annonces légales sous forme d’extraits ou d’avis (art.325-3, al.2).Il a les pouvoirs les plus étendus pour administrer, liquider, réaliser l’actif mobilier et immobilier et pour arrêter le passif compte tenu des sinistres non réglés. Toute action mobilière ou immobilière ne peut être intentée ou suivie que par lui ou contre lui. Il est le seul représentant légal de la société d’assurance et agit sous son entière responsabilité. Pendant la durée de la liquidation, l’entreprise demeure soumise au contrôle de la commission Régionale de contrôle des assurances et du juge-contrôleur qui peuvent demander à tout moment au liquidateur tous renseignements et justifications et faire effectuer les vérifications sur place.
Le liquidateur ne peut aliéner les immeubles appartenant à l’entreprise et les valeurs mobilières non cotées en bourse que par voie d’enchères publiques, sauf autorisation spéciale du juge-contrôleur, qui a du reste la faculté d’ordonner des expertises aux frais de la liquidation.
La répartition des deniers issue de la réalisation de l’actif se fait selon les dispositions des articles 325-6 à 325-8 du code CIMA. Un accent particulier est mis sur les créances salariales qui doivent être privilégiées aux autres. En général, la répartition des fonds se fait avec l’autorisation du juge-contrôleur.
La clôture de la liquidation est prononcée par le tribunal sur le rapport du juge contrôleur lorsque tous les créanciers privilégiés tenant leurs droits de l’exécution des contrats d’assurance, de capitalisation ou d’épargne ont été désintéressés ou lorsque le cours des opérations est arrêté pour insuffisance d’actif.
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