Loi n°2023/009 du 25 juillet 2023 portant charte de protection des enfants en ligne au Cameroun : ce qu’il faut en retenir
Pr KALIEU ELONGO Yvette
Université de Dschang
La récente loi promulguée et qui a désormais pour but d’assurer une plus grande protection des enfants dans le cyberespace a été vivement saluée. Elle arrive à temps et devrait contribuer à réduire au maximum les dérives constatées dans le cyberespace surtout à l’encontre des enfants.
Les éléments essentiels à retenir de cette loi sont les suivants :
- La loi vise uniquement la protection des enfants âgés de moins de 18 ans. Elle n’assure donc pas la protection de tous les mineurs puisque la minorité légale au Cameroun est en dessous de 21 ans. Il faudra donc pour les faits à l’encontre des mineurs de plus de 18 ans recourir à d’autres dispositifs par exemple aux textes en matière de cybercriminalité. Toutefois pour la définition de la pédophilie, la loi emploie plutôt le terme de mineur sans autre précision.
- La loi identifie clairement les rôles et responsabilités des différents intervenants du cyberespace à savoir les fournisseurs de contenus qui peuvent être, il convient de le signaler, aussi bien les personnes physiques que les personnes morales, les fournisseurs d’accès internet qui sont uniquement les personnes morales et les fournisseurs de moteurs de recherche qui peuvent être tant des personnes physiques que morales et enfin les gérants de cybercafé et les promoteurs de réseaux sociaux qui peuvent être indifféremment des personnes physiques ou morales.
- La loi met à la charge des intervenants précités une obligation générale d’assurer la sécurité des enfants dans le cyberespace par le respect de leurs droits, la sensibilisation et la formation mais aussi par une obligation de collaboration avec le secteur public en matière de protection des enfants. Ces obligations consistent par exemple à suspendre l’accès à internet, au contenu numérique ou à un réseau social à un consommateur auteur de contenu portant atteinte à l’intégrité ou à la dignité des enfants, à mettre fin à l’indexation des contenus portant atteinte à l’intégrité ou à la dignité des enfants, ou encore à suspendre des sites identifiés comme portant atteinte à l’intégrité ou à la dignité des enfants.
- Des obligations spécifiques sont également mises à la charge des différents intervenants comme la mise à disposition de guides de bonnes pratiques dans le cyberespace, la mise à la disposition des utilisateurs des procédures et moyens techniques de contrôle de l’accès des enfants à internet ; la mise à disposition de moyens permettant le retrait immédiat des publications ou le blocage à l’accès des publications portant atteinte à la dignité et à l’intégrité des enfants.
- La publicité en ligne concernant les enfants est désormais organisée pour ce qui concerne son contenu mais aussi ses moyens. Est ainsi interdite par exemple la publicité présentant les enfants en situation de vulnérabilité.
- Différentes infractions à l’encontre des intervenants du cyberespace sont prévues avec pour certaines des sanctions très lourdes. On peut citer entre autres
- Le non signalement, l’absence de blocage ou de suppression d’un contenu portant atteinte à la dignité et à l’intégrité des enfants
- Le fait de laisser prospérer des contenus portant atteinte à la dignité et à l’intégrité des enfants en situation de danger
- La diffusion de publicités destinées aux enfants avec des contenus inappropriés, de publicités mettant en scène des enfants ou de nature à compromettre l’éducation des enfants ou de leur causer un dommage.
- L’enregistrement, la fixation ou la diffusion de contenus à caractère sexuel impliquant un enfant ou encore la consultation habituelle de sites contenant des images de pédopornographie.
- L’assouplissement du régime de preuve des infractions avec l’admission des enregistrements audio et vidéo ou tout autre moyen de conservation électronique comme moyen de preuve ou encore l’admission de l’écrit sous forme électronique.
Tout est donc désormais mis en place pour que tous les intervenants et tous leurs actes dans le cyberespace qui porteraient atteinte à l’enfance n’échappent pas au contrôle et éventuellement à la répression. Le montant élevé des amendes pouvant aller parfois jusqu’à 250 000 000 de francs CFA devrait jouer un rôle dissuasif et contribuer à amener les différents intervenants à s’impliquer véritablement dans la protection des enfants en ligne.
Kaham
Merci pour ce résumé succinct professeur