COUR DE JUSTICE DE LA CEMAC ARRÊT N°001/ 2021 Du 18/03/2021, AFFAIRE : M. contre la BEAC

Pr KALIEU ELONGO Yvette Rachel
Université de Dschang

On pensait que le contentieux du droit à l image et surtout de sa violation était un contentieux suranné ou qu’il ne concernait que quelques stars qui à l’occasion de la publication de leur image dans les magazines plus ou moins célèbres saisissent les juges pour obtenir l’octroi de dommages-intérêts généralement fixés à un franc symbolique.

C’était oublier  que l’atteinte au droit à l’image peut concerner tout le monde et que toute personne peut obtenir la condamnation de celui qui  utilisé son image sans son autorisation. Cela est vrai même l’auteur de la violation est une Banque Centrale.

C’est ce qui est arrivé dans l’affaire  M. contre la BEAC dans laquelle la BEAC s’est vue condamnée par la Cour de Justice de la CEMAC  a payé à un artisan la somme de 100 000 000 F CFA pour utilisation frauduleuse de son image sur un billet de banque émis par cette Banque Centrale.

De quoi s’est-il donc agit ?

Monsieur M. artisan  sculpteur de son état, constate que son image ainsi que celle de ses œuvres figurent sur les billets de banque  en circulation dans la zone CEMAC,  et plus précisément sur le billet d’une valeur de 500 FCFA émis par la Banque des Etats de l’Afrique Centrale.  Pourtant, il n-a jamais donné son accord exprès ou tacite pour leur utilisation par la Banque. Estimant que cette utilisation faite sans son autorisation lui causait  un préjudice tant financier que moral, l’artisan décide d’engager des actions obtenir réparation. Dans un premier il saisit le juge judicaire national mais sans succès  puisque la BEAC lui oppose l’immunité de juridiction découlant de l’Accord de Siège entre cette institution  et le Cameroun. Dans un deuxième temps il recourt à la voie amiable en saisissant directement la BEAC. Mais il n’aura pas plus de succès. C’est pourquoi il décide de  saisir la Cour de Justice de la CEMAC pour mettre en jeu la responsabilité de la BEAC et obtenir réparation  du préjudice à lui causé.

A l’appui de sa requête, il fournit plusieurs éléments justifiant de son identité et surtout de son image conforme à celle apposée sur le billet de banque sans son autorisation préalable. Les billets en question quoique remplacés par ceux d’une nouvelle gamme sont encore en circulation au moins chez les collectionneurs. Bien plus, son image  apparait toujours sur le site internet de la Banque Centrale. Par conséquent, la réparation ne saurait consister selon lui au retrait des biens en cause mais uniquement en l’octroi de dommages- intérêts.


 Après s’être déclarée compétente pour connaitre de ce litige, la Cour  a jugé que  l’artisan tait fondé dans sa requête  et a condamné la BEAC  à lui payer la somme de 100 000 000 s de francs CFA à titre de dommages -intérêts.

Il aura fallu toutefois près de 9 ans depuis les premières procédures en gagées devant le juge national  pour que l’artisan obtienne enfin gain de cause.  A défaut de voir son image disparaitre des billets, il recevra une  compensation financière.

Désormais, il ne suffira plus seulement en présence d’un billet de banque de s’assurer s’il s’agit d’un vrai ou d’un faux billet de banque, mais de s’assurer aussi que son image ou celle d’un proche  ne se trouve pas sur ce billet. Si oui, cela pourra valoir quelques millions de billets en plus….