AGREMENT UNIQUE DES ETABLISSEMENTS DE CREDIT DANS LA CEMAC : UN NOUVEAU REGLEMENT
Pr Yvette Rachel KALIEU ELONGO
Université de Dschang
Par le Règlement n°01/24/CEMAC/UMAC/COBAC du 20 décembre 2024 portant agrément unique des établissements de crédit dans la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale, le régulateur communautaire a modifié le précédent Règlement du 27 novembre 2000 portant sur le même objet.
Le nouveau Règlement se caractérise d’abord par des modifications de forme. Le contenu du texte a été réorganisé. Certaines dispositions ont été supprimées, d’autres réécrites et nouvelles ajoutées. Alors que l’ancien texte comportait 12 articles, le nouveau texte en comporte 18.
Sans procéder à une réforme totale du précédent Règlement, le nouveau texte comporte néanmoins des modifications importantes.
On peut d’abord noté que le visa du Règlement contient de nouveaux textes à l’instar du Règlement du 25 avril 2014 relatif au traitement des établissements de crédit en difficulté dans la CEMAC, celui du 27 mars 2015 modifiant et complétant certaines conditions relatives à l’exercice de la profession bancaire ainsi que l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du Groupement d’intérêt économique.
Relativement à son champ d’application, et à la différence de l’ancien Règlement, il est spécifié que l’agrément concerne les établissements de crédit. Ce terme est désormais utilisé en lieu et place de banques et établissements financiers. Par ailleurs, l’agrément ne concerne plus que la création des succursales à l’exclusion des agences et filiales. En ce qui concerne la durée d’exercice exigée des établissements de crédit pour obtenir l’autorisation, le nouveau Règlement, en reformulant les dispositions précédentes, prévoit une durée minimale de deux ans, ce qui signifie que l’agrément unique est accordé à l’établissement de crédit agréé depuis au moins 2 ans.
Des modifications ont été également apportées relativement à la procédure d’agrément unique. Le dossier n’est plus transmis simultanément à l’autorité monétaire et à la COBAC Désormais, la demande d’agrément comportant un dossier complet – dont la composition est à fixer par la COBAC, est adressée à l’autorité monétaire du pays d’accueil. Si elle donne un avis favorable à l’ouverture de la succursale, elle doit en informer la COBAC dans un délai de 03 mois à compter de la réception de la demande. La COBAC dispose également d’un délai de 03 mois pour donner un avis favorable.
La décision d’autorisation préalable ou de refus d’autorisation est notifiée à l’autorité monétaire du pays d’accueil, à celle du pays d’origine, à l’établissement requérant et à la Direction Nationale de la BEAC du pays d’accueil. Mais la notification de la décision de la COBAC n’est plus assortie d’aucun délai et celle-ci ne peut plus faire l’objet de recours devant la Cour de Justice de la CEMAC.
Le Règlement de 2024 comporte des dispositions nouvelles applicables à la gestion des succursales, à leur contrôle et au traitement des difficultés que ces dernières peuvent connaître.
S’agissant de leur fonctionnement et de leur gestion, les succursales doivent être pourvues d’une dotation minimale mise en place par l’établissement de crédit. Elles doivent respecter les conditions de fonctionnement prévues par la COBAC. Leur direction doit être assurée par deux personnes physiques au moins après avis de non objection du Président de la COBAC. Les établissements de crédit doivent intégrer la situation des succursales dans leur contrôle interne et assurer le respect par celles-ci des règles en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux.
La COBAC, quant à elle, est chargée de veiller à l’application de la réglementation par la supervision des succursales à travers le contrôle sur pièces et sur place. Les autorités monétaires nationales ont également le pouvoir d’exercer un contrôle administratif sur les succursales, le rapport devant être adressé à la COBAC.
Le nouveau Règlement prévoit aussi le traitement des difficultés des succursales avec le pouvoir désormais reconnu à la COBAC de prendre des mesures d’assainissement ou de restructuration ou de prononcer des sanctions disciplinaires ou pécuniaires contre celles-ci en cas de difficultés. Ces sanctions peuvent aller jusqu’au retrait de l’autorisation d’implantation de la succursale.
Le Règlement est entré en vigueur depuis le 1er janvier 2025. Il va donc s’appliquer aux établissements de crédit qui souhaitent obtenir une autorisation pour leurs succursales à compter de cette date. Quant aux établissements ayant déjà obtenu l’autorisation, ils devront se mettre à jour des disposions nouvelles du Règlement. L’article 17 a prévu à cet effet une période transitoire de 12 mois. Par contre, le Règlement ne comporte pas de dispositions concernant les demandes d’autorisation d’ouverture en cours au jour de l’entrée en vigueur du texte. Suivant le principe de la non rétroactivité de la loi, les demandes en cours soit au niveau des pays d’accueil soit au niveau de la COBAC devraient être traitées suivant les dispositions en vigueur au moment du dépôt de la demande. L’article 14 ayant prévu les modalités d’application du Règlement, il faut espérer que parmi les modalités, figureront des dispositions relatives au sort des demandes en cours.
En attendant, il faut saluer l’adoption de ce nouveau Règlement qui tout en apportant des modifications utiles relativement à l’agrément unique participe à renforcer la liberté d’établissement des entreprises dans la CEMAC.
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